Dixième année de parcours ... on va arriver à Saint Jacques de Compostelle !!!
Le parcours jour après jour, commenté par les pèlerins et illustré par les images de Denise et Fulvio :
2019 : O Cebreiro → Fisterra
Le parcours dans ses détails logistiques (par Fulvio) et géo-historiques (par Jacques)
Dimanche 20 octobre : Marly - Carrion de los Condes (1108 km)
Formant un grand contraste avec la Castille, la Galice, dernière des provinces espagnoles du Chemin, subit fortement l’influence maritime. Son massif granitique érodé, ses côtes découpées, ses activités de pêche et les origines celtiques de sa population l’apparentent à la Bretagne. Mêmes petits chemins sinueux au flanc des collines, même architecture en blocs de granit, mêmes petits ports nichés au fond des rias. Mais l’altitude tourne autour de 500 mètres, la fraîcheur y est fréquente et elle surprend souvent les marcheurs. L’humidité apportée par l’océan donne un paysage de bocages où les chemins creux se dissimulent sous une végétation luxuriante et abondante. C’en est fini de la sèche et aride Castille. Ici tout est vert, l’eau ruisselle de toutes parts et s’écoule dans les vallons. Le temps est changeant sous le fréquent crachin du pays, éclaircies et averses peuvent se succéder rapidement. Nous y voilà ! C’est la dernière année d’efforts pour arriver au but. Quelle émotion de terminer ces 100 derniers km de marche et d’avoir la joie et la satisfaction d’être à Santiago, au bout du pèlerinage, devant St Jacques. Courage et persévérance, vous y serez dans quelques jours.
— Départ en car depuis Carrion de los Condes jusqu’à O Cebreiro (249km)
— km 0 : picnic + lectio près de l’église de O Cebreiro, puis départ de la marche
— km 12,5 : arrivée, hébergements à Fonfria
Le pittoresque village d’O CEBREIRO marque depuis des siècles le point de départ du dernier tronçon du Chemin de Compostelle.
On y découvre les premières « pallozas », petites maisons datant des Celtes que l’on trouve toujours en Galice Orientale. Ces chaumières très rustiques servaient à la fois d’étable et de logement. Elles ne comportent qu’une petite ouverture en guise de porte.
Du village on a un point de vue exceptionnel sur le relief galicien. La silhouette dentée de la Sierra del Norte contraste avec les monts arrondis qui s’étendent au sud. Cette région maritime verdoyante dont l’arrière-pays évoque l’Irlande, revendique ses origines celtiques. Les pèlerins trouvèrent abri dans le village dès le IXe siècle. L’église Santa Maria la Real est du XIe siècle. On peut y voir :
— une Vierge à l’Enfant, sculpture sur bois du XIIe siècle, à la facture rigide ;
— le calice et la patène miraculeux ;
— les fonts baptismaux qui datent de la fondation de l’église (baptême par immersion).
La tradition dit que vers l’an 1300, par une de ces matinées d’hiver, où la tempête de neige recouvre le toit des maisons, un berger du village de Barxamajor était comme chaque jour venu assister à la messe. Le moine qui célébrait la messe pensa à part « quel courage de faire tout ce chemin par un temps pareil pour un peu de pain et de vin ». Au moment de la consécration le moine fût stupéfait : l’hostie se transforma en vraie chair et le vin en vrai sang. Le calice datant du XIIe siècle est toujours exposé. Quant aux Saintes Espèces, les Rois Catholiques les firent mettre dans le reliquaire et l’ampoule qu’on peut y voir.
Après O CEBREIRO, il faut prendre le très beau chemin de crête qui permet d’éviter le goudron. Piste forestière qui débouche après 3 km sur le village de LINARES (1240m), avec son église Santo Estevo, au clocher carré surmonté d’une coupole de pierre. Sur sa porte une coquille rappelle celle de O CEBREIRO. Le nom de LINARES vient des champs de lin d’où les moines tiraient le drap pour les besoins de l’hôpital. Durant cette descente douce vers la verte Galice aux mille ruisseaux, vergers, potagers ou fontaines, vous verrez aux carrefours des calvaires de pierre (os cruceiros) et parfois des greniers à grains sur 4 piliers appelés « horreos », typiques de la Galice, pour protéger les récoltes des prédateurs et de l’humidité ; des maisons de granit couvertes d’ardoises et des bois de chênes et châtaigniers ou encore les nouvelles plantations de pins et d’eucalyptus.
A 2 km, vous atteindrez l’Alto de San Roque (1270 m), où se dresse la statue moderne d’un pèlerin en proie au mauvais temps, la cape gonflée par la bourrasque et le chapeau prêt à s’envoler. N’oubliez pas votre cape ou un coupe-vent car le vent d’ouest peut souffler très fort. Tout comme à LINARES, Hospital de Condesa a une coquille de pèlerin sur la porte de son église, San Juan de Hospital, ainsi qu’une croix de St Jacques sur le clocher. Le chemin se poursuit par l’Alto de Poio, le point le plus élevé de Galice qui culmine à 1337 m. et offre un superbe panorama sur les collines boisées s’étendant en contrebas. Il ne reste plus que 3 km de descente douce pour arriver à FONFRIA (village de la fontaine froide) à 1280 m, qui est construit sur le Chemin qui longe de petits lopins de terre bordés de murets. L’humble église San Juan, toute de dalles de granit a un clocher-mur à 2 arcades. C’est l’arrivée de l’étape.
— Départ en car depuis Fonfria jusqu’au la sortie de Triacastela, à l’embranchement de la route pour San Xil (ayant pris du retard ce matin, la marche, initialement prévue jusqu’à Sarria, s’est arrêtée à Calvor)
— km 0 : Triacastela, départ de la marche
— km 10 : picnic + lectio près de la chapelle San Roque à Furela
— km 12,7 : ramassage par le car à Calvor
— arrivée en car à l’hébergement de Vilei
Petite étape de verdure mais grand bol d’oxygène, car la quasi-totalité se fait en forêt. On avance sans avoir vraiment la notion de la distance parcourue, car le parcours est très varié. Quel changement depuis la Meseta où la ligne droite revenait comme une constante. Ici les changements interviennent tous les 50 m. Nous montons, descendons, contournons, passons des fermes, des calvaires, des chapelles, et sautons les ruisseaux. Pas de monuments extraordinaires, en revanche vous croiserez souvent des « horreos » ou greniers à maïs. Vous remarquerez également, détail curieux, dans les potagers des têtes de choux hautes, perchées sur leur tige, car elles sont effeuillées au fil des jours pour faire la soupe.
TRIACASTELA est un village de 150 habitants environ. Son nom conserve le souvenir des 3 châteaux du voisinage que l’on voit sur ses armoiries. On y trouvait une prison pour pèlerins turbulents fermée par de forts barreaux de bois. De nombreux graffitis subsistent dont plusieurs coqs réalisés par les détenus. L’église dédiée à St Jacques a été reconstruite en 1790. Elle garde cependant 2 absides romanes. Maître-autel et croix processionnelle du XIIe siècle portent l’image de St Jacques.
A la sortie du village, une haute et mince pyramide de pierres ornée d’une épée métallique et coiffée d’une petite statue de pèlerin rappelle la tradition selon laquelle les pèlerins se chargeaient d’une lourde pierre de calcaire. Ils la portaient pendant 2 jours jusqu’au four de CASTANEDA pour la transformer en chaux servant à bâtir la basilique de St Jacques de COMPOSTELLE.
Vous constaterez sur le parcours cette année un changement de signalétique pour le Chemin. Les jolis panneaux jacquaires sur fond blanc qui indiquaient le nom de la localité en Castille n’existent plus. En Galice très souvent, vous n’aurez aucune idée du nom du hameau ou village dans lequel vous pénétrez. Par contre vous aurez tous les demi km des bornes qui vous indiqueront le compte à rebours jusqu’à SANTIAGO. Cela va vous donner des ailes certainement !
Le premier et très humble hameau de BALSA, avec sa chapelle Nostra Señora de las Nieves (N.D. des Neiges), est un bon échantillon de ce que vous verrez pendant 3 ou 4 jours : habitat dispersé, eau abondante, chapelles minuscules, et beaucoup d’« horreos ».
Le chemin creux qui s’élève dans une profonde forêt de chênes, châtaigniers et bouleaux n’est pas sans rappeler nos contes celtes de la forêt de Brocéliande. En haut de la côte, on découvre une fontaine avec piscine et conque en forme de coquille Saint-Jacques.
À SAN XIL, le paysage s’ouvre largement vers le sud piqué de hameaux. Au bas du village, l’église conserve un calice du XVe siècle. La montée à l’Alto de Riocabo (905m) offre un large point de vue. Après avoir traversé le village de MONTAN vous serez vite dans le village suivant de FURELA, qu’une ruelle dallée traverse et où vous attend le pique-nique. Vous ne manquerez pas à la sortie du village, une chapelle : la Ermita San Roque qui voisine avec une maison paysanne armoriée. A 3 km environ, vous atteindrez CALVOR, dont l’église Santo Estevo garde des vestiges romans. Un chapiteau wisigothique sert de bénitier. Elle est bâtie sur un ancien camp fortifié. Plus que 5 km et vous voici à SARRIA, terme de la marche du jour.
SARRIA : Petite ville plus importante (7400 habitants). Le passage du Chemin de Compostelle favorisa son essor. Les auberges pour pèlerins s’alignent le long de la rue Mayor, la grande rue de SARRIA. On peut y découvrir successivement bordant le chemin de la haute ville :
— l’église Santa Marina, moderne mais sur l’emplacement d’un ancien sanctuaire médiéval ;
— l’hôpital San Antonio, devenu palais de justice, fondé au XVIe siècle ;
— En face, l’église San Salvador (du Sauveur) romane, transformée au XIVe siècle, aux peintures naïves. La porte principale est gothique, la porte latérale avec une archivolte dentelée et un Christ Pancreator sur le tympan ;
— La tour et les murailles de l’ancienne forteresse des Seigneurs subsistent ;
— Le couvent de la Magdalena, d’abord aux Augustins puis aux Pères de la Merci qui l’ont restauré : cloître flamboyant. L’église conserve son tympan du XIIIe siècle.
SARRIA est pour les pèlerins la dernière ville étape avant les mythiques 100 derniers km. (distance minimum pour recevoir la Compostella tant convoitée). Située à une dizaine de km de SARRIA, la borne des 100 km est couverte de graffitis et son sommet est garni de petits cailloux abandonnés par les pèlerins. Les saluts que se lancent les pèlerins « buen camino » ou « ultreia », ont eux aussi un effet dopant.
— km 0 : Vilei, départ de la marche
— km 8,1 : picnic + lectio à Ferreiros, près de l’auberge "Casa Cruceiro"
— km 18,5 : arrivée, hébergements à Portomarin
Cette étape pourrait s’intituler « Cheminement au cœur de la Galice ». Dès le départ on s’écarte des routes et du monde contemporain. Pont médiéval, forêts profondes plantées de châtaigniers, hameaux minuscules reliés les uns aux autres par des chemins creux bordés de murets. La Galice qui semblait lointaine et chargée d’un exotisme indéfinissable, devient familière et fidèle aux images de notre enfance. En marchant vous serez pris d’enchantement par tant de beauté et, bien sûr, vous songerez à Merlin dans sa forêt de Brocéliande. Les ruisseaux sont franchis à pied sec sur d’étranges dalles de pierre : les « corredoiras ». Avec les « horreos » ils constituent une deuxième particularité architecturale.
En quittant VILEI, vous serez tout de suite dans le hameau de BARBADELO, 15 habitants, où curieusement l’église et une maison voisine, ancien prieuré, conservent le nom de « Mosteiro », nom à l’époque du monastère (entre 874 et 1009). Cette église, Santiago du XIIe siècle, au clocher fortifié, est surtout remarquable par ses deux tympans romans et les chapiteaux historiés des portes Nord et Ouest, aux sculptures archaïques riches en animaux mythiques. Plus loin, à MERCADO DA SERRA, puis à PERUSCALLO vous allez aborder le fameux et curieux petit ouvrage rural nommé « corredoira », le mot cousin de notre corridor qui désigne l’aménagement d’une portion du Chemin où l’eau des ruisseaux prend la chaussée pour lit. On aménage alors le long de ces chemins aqueux des sortes de trottoirs, faits à la manière des gués, d’une succession de pierres plates. Les hameaux se succèdent assez rapprochés :
— MIRALLOS, hameau de quelques maisons, il y eut un prieuré de l’ordre de Malte. Il reste une fontaine à l’entrée et une petite église Santa Maria avec un portail à 3 archivoltes. Des têtes de lion sont visibles sur le tympan.
— FERREIROS, village de 25 habitants, l’église romane de Santa Maria était à l’origine dans ce village et a été transportée pierre par pierre jusqu’à MIRALLOS.
— ROZAS, la Peña dos Corvos est la montagne des corbeaux. C’est une forte colline du haut de laquelle on peut apercevoir PARADELA, au sud.
— MOIMENTOS, une maison porte la croix templière gravée sur son lourd linteau de pierre.
Entre PARROCHA et VILACHA (2 hameaux-rue alignés le long du Chemin), on laisse au sud les ruines du monastère de Loyos. Quelques pierres ont été réemployées dans les murs des maisons. Le chemin menant à PORTOMARIN est balisé par une borne à chaque km. Vous apercevrez bientôt sur le rio Miño les eaux étincelantes du lac artificiel de Belesar, ce sera une des principales curiosités de la journée avec le barrage. L’ancien village de PORTOMARIN était sur les 2 rives du rio Miño. Il a été noyé en 1962 par un barrage créant un vaste lac. Ses ruines apparaissent par basses eaux près de l’arche subsistante, ainsi qu’une pile au milieu des eaux du vieux pont roman de 1120. Près du nouveau pont subsiste, parce qu’elle était surélevée, une chapelle de Ste Marie des Neiges. Mais les monuments importants ont été sauvés des eaux et reconstruits pierre par pierre sur la colline au milieu des nouvelles maisons blanches :
— l’église San Juan (romane XIIIe siècle) devenue San Nicolas était l’église forteresse des frères de St Jean de Jérusalem. Les lignes sévères des murs de l’édifice couronné par des tourelles et un chemin de ronde crénelé, tranchent avec les richesses de ses 3 portails (vieillards de l’Apocalypse, végétaux, animaux et personnages symboliques) et la vaste nef avec une seule voûte sur laquelle ont été recollées les fresques romanes.
— L’église San Pedro (1182) également romane, possède un portail à 3 archivoltes.
— Le Palacio de Berbetoros du XVIIe siècle, dresse ses arcades sur la place centrale.
— La Casa dos Condes : maison comtale du XVIe siècle.
Autour de PORTOMARIN, l’architecture traditionnelle est constituée de maisons de maçonnerie sèche couvertes d’ardoises. Elles comportent très souvent une cave pour conserver la production viticole. Mais à PORTOMARIN, c’est l’eau-de-vie que l’on conserve. Le vin est distillé dans des alambics installés sur la place du village. Cette eau-de-vie « augardente » a sa fête chaque dimanche de Pâques. Goûtez-y mais modérément car demain il faut encore marcher !
— Départ en car de Portomarin jusqu’à Ventas de Naron (une pluie dense et continue s’abat sur notre chemin qui n’offre aucun abri -pour un picnic de 50 personnes- jusqu’à Palas de Rei, où la marche du jour se terminera)
— km 0 : Ventas de Naron, départ de la marche
— km 11,5 : picnic sous une grange à l’entrée de Palas de Rei, puis ramassage par le car
— arrivée en car à l’hébergement de Melide
Les 11 premiers km au départ de PORTOMARIN s’effectuant en autocar, vous éviterez ainsi de jouer à cache-cache avec la LU633 et les camions qui l’empruntent, le Chemin étant parallèle à cette route bruyante. Mais en partant d’HOSPITAL DE LA CRUZ, vous retrouverez les paisibles hameaux galiciens, les « horreos » et les calvaires de granit.
Au départ d’HOSPITAL DE LA CRUZ, (680m), le Chemin passe sous d’immenses châtaigniers. Il tire son nom d’un ancien hôpital qui accueillait encore les pèlerins en 1739. Il existe à nouveau dans la commune un refuge pour pèlerins installé dans les anciennes écoles.
Le hameau suivant très proche est VENTAS DE NARON (700m), où une bataille acharnée aurait opposé, chrétiens et musulmans. À la sortie de VENTAS, on peut voir un humble « cruceiro » et une chapelle de pierre rose dédiée à Marie-Madeleine. Au lieu-dit LAMEIROS, (640 m) avant LIGOND, à droite, la chapelle St Marc et la maison voisine ont des pierres héraldiques. Comment ne pas penser encore à la Bretagne un peu plus loin sur un lieu verdoyant où, devant un chêne magnifique se dresse un calvaire sculpté, le plus beau peut-être de tout le Chemin ? Cette croix dressée parmi les chênes séculaires à l’entrée de LIGONDE est particulièrement émouvante.
LIGONDE (580 m) 80 habitants, est actuellement fort modeste, mais fut importante par son histoire. Les maisons n° 3 & 11 du carneiro (charcutier) ont conservé un cachet médiéval avec 2 pierres blasonnées. En face du n° 17 se trouve la ferme Nabal do Hospital, ancien hôpital important qui a accueilli les pèlerins pendant presque 1000 ans (856 – 1811). Charles Quint y fit halte en 1520, ainsi que le roi Philippe II en 1554.
— AIREXE (le nom signifie « église »en Galicien) l’église de la paroisse Santiago est toujours là, remaniée, elle conserve un arc roman en plein cintre reposant sur 2 demi-colonnes cannelées. A l’extérieur, au bas du mur Sud, un bas-relief représente un homme et des animaux, peut-être Daniel parmi les lions.
— LESTEDO (600 m), l’église est dédiée à St Jacques représenté par une statue. Encore plusieurs hameaux à traverser, OS VALOS, BREA, — O ROSARIO sans grand intérêt avant d’arriver à PALAS DO REI. Toutefois vous passerez par l’Alto do Rosario, d’où vous pourrez apercevoir le cône parfait du Pico Sacro, (mont sacré) proche de Compostelle. Connaissez-vous sa légende ? La voici :
C’est là que se seraient trouvés les taureaux domptés par les disciples de St Jacques. Lorsque, ramenant son corps de Terre Sainte, ils débarquèrent à PADRON, ils demandèrent une sépulture à la cruelle reine LUPA (louve). Elle leur répondit : "Allez dans cette montagne, vous y trouverez un troupeau de bœufs. Prenez-en 2 pour les atteler et allez où vous voudrez." Elle savait qu’elle les envoyait en réalité au-devant de taureaux sauvages. Mais, ô miracle, ces bêtes se laissèrent approcher et atteler par les chrétiens ! Furieuse, la reine LUPA voulut alors lancer des soldats à leur poursuite, mais une crue subite du torrent les protégea. C’est alors que la méchante reine se convertit elle-même et offrit son palais pour la sépulture de St Jacques.
— PALAS DO REI (565 m) commune d’environ 800 habitants à l’architecture moderne et sans charme, vous remarquerez tout de même l’église de San Tirso, construite en 1955, qui intègre une porte romane du XIIe siècle. Plusieurs maisons médiévales dont une est ornée d’une coquille Saint-Jacques sculptée. La partie basse de PALAS DO REI s’appelait Campo dos Romeiros (Champ des pèlerins).
Entre CARBALLAL et SAN XULIAN, d’un modeste col précédé d’un bois de chênes on domine la vallée du rio Pambre. L’étape n’a que très peu de dénivelé.
— SAN XULIAN (480m) possède une jolie petite église romane. Sur l’abside, on distingue une arcature aveugle à billettes. A proximité près de la fontaine, vous pourrez voir une croix. Vous traverserez rapidement CASANOVA (hameau de 15 habitants environ) qui possède tout de même une auberge municipale, puis PORTO DO BOIS. Entre CAMPANILLA et LEBOREIRO, vous passerez au lieu-dit COTO et de la province de LUGO à celle DA CORUNA, toutes 2 galiciennes.
Et la fin de l’étape arrive avec LEBOREIRO : vieux village de 70 habitants (Au XIIe siècle Campus LEVURARIUS). Vous pourrez y voir un traditionnel « cabeceiro », sorte de grand panier en osier qui sert à conserver le maïs. Juste à côté se dresse l’église Santa Maria, humble, mais en pierres bien appareillées, de style roman-transition, avec une porte en arc brisé et archivolte à décor denticulé. Vous y verrez également une Vierge à l’Enfant entre 2 anges sur le tympan et même une sirène sur le chapiteau. En face, l’ancien hôpital portant l’écu de la grande famille galicienne des Uloa. A la sortie de LEBOREIRO, relié au village par un chemin pavé, fort bien restauré, le puente de la Magdalena, pont médiéval à une arche, petit mais bien proportionné sur le rio Seco.
— km 0 : Melide, départ de la marche
— km 7 : picnic + lectio à Boente, près de l’église "Santiago"
— km 17,5 : arrivée, hébergements à Arzua
Dans cette étape et à mesure que l’on progresse vers l’Ouest, changement de décor dans la nature : les troncs d’arbres se font plus lisses et plus élancés et, si la brume s’est levée, le paysage dévoile sa riche palette de verts. Un parfum familier vient chatouiller les narines et au bout de quelques secondes vous l’aurez identifié : c’est l’eucalyptus. La Galice comme tout le nord-ouest de l’Espagne est réputée pour ses forêts d’eucalyptus. Mais le silence est total : ni chant d’oiseaux, ni bourdonnement d’insecte. En effet, curieusement les oiseaux et les insectes ne supportent pas son odeur forte et tonique si caractéristique et ils désertent la région.
Le parcours est sinueux, vous trouverez une borne tous les 500 mètres ; il faut ajouter celles placées aux fourches, carrefours ou points délicats. Dans ces conditions, impossible de se perdre même dans le plus épais brouillard galicien... Vous traverserez encore des villages modestes. Vous franchirez des ponts en dos d’âne ou des « corredoiras » sur les multiples cours d’eau. Vous couperez la N547 sans jamais envier le conducteur filant à toute allure vers SANTIAGO. Il ne voit rien de cette Galice qui vous enivre à chaque pas.
MELIDE : Ville de départ d’étape, de 5000 habitants. Important centre jacquaire qui eut plusieurs hôpitaux. A l’entrée a été reconstruit le portail roman de l’ancienne église San Pedro, avec 3 archivoltes richement sculptées. A côté un calvaire du XVIe siècle sculpté sur les 2 faces, le plus ancien de Galice, son Christ en gloire est sur un trône adossé à la croix. Au centre de la localité, l’église paroissiale avec un portail du XVIIe siècle et une nef gothique. A la sortie de la ville, belle église de Santa Maria de Melida, romane du XIIe siècle, nef unique, chevet semi-circulaire, portail et chapiteaux sculptés, peintures du XVe siècle.
Après avoir traversé les hameaux de CARBALLAL, PENAS, PARABISPO, PEROXA, vous entrerez dans BOENTE DE ARRIBA, qui a une église Santiago, une fontaine de pèlerins, une maison noble à écu orné de têtes de loup et un vieux pont pour franchir le rio Boente.
C’est dans le village suivant, tout dispersé, de CASTANEDA (la châtaigneraie) que se situaient les fours à chaux où les pèlerins déposaient les pierres qu’ils portaient depuis TRIACASTELLA. Vous franchirez sur un vieux pont à une arche le rio Izo, dont les berges ont donné son nom à RIBADIZO DE BAIXA. De l’autre côté du rio la première maison à droite fut un hôpital fondé en 1425 et dans cette même maison, en ce très bel endroit, un nouveau refuge de pèlerins renoue avec la tradition. Il ne vous reste plus que quelques km pour terminer l’étape à ARZUA, 2500 habitants. C’est le dernier bourg de quelque importance que vous rencontrerez sur le Camino avant COMPOSTELLE. Vous y suivrez entre les maisons à arcades, les rues pavées portant les vieux noms : rua Cima de Lugar, rua do Carme, (rue du Haut du village, rue du Carmel). Cette localité est réputée pour son fromage au lait de vache vendu frais et affiné, le Queixo et, tous les ans en Mars, le village célèbre sa Fiesta do Queixo qui réunit les producteurs locaux. C’est pourquoi on y trouve la statue de la Queixeira, en l’honneur des vendeuses de fromage. Vous pouvez voir dans ce village :
— l’église Santa Magdalena, abritant des sépulcres et ce qui reste d’un ancien hôpital du XIVe siècle ;
— tout près, l’église Santiago, romane, sert encore d’abri aux pèlerins ;
— à la sortie du village, la Fuente de los Franceces, (Fontaine des français) à l’abandon et menacée de disparition.
Reposez-vous bien et rêvez au but final. SANTIAGO à 41 kilomètres..
— km 0 : Arzua, départ de la marche (ayant pris du retard ce matin et avec l’impératif de la rencontre avec le groupe Bipel à San Marcos, la marche, initialement prévue jusqu’à Santa Irene, s’est arrêtée à Salceda)
— km 11,4 : picnic + lectio à Salceda, puis ramassage par le car
— arrivée en car à l’hébergement de San Marcos et visite du monument du Monte de Gozo
Cette étape se poursuit à travers les forêts d’eucalyptus. Vous rencontrerez probablement sur votre route des pèlerins en provenance du Camino del Norte qui rejoint le Camino Frances à ARZUA. Le Chemin, aussi accueillant qu’en Navarre ou en Castille, vous offre maintenant de nombreuses occasions de halte pour vous retenir. Vous traverserez à plusieurs reprises la N547, tout en voyant de chaque côté, de nombreuses fermes ou hameaux lilliputiens sans grand intérêt.
Dans la forêt qui précède TABERNAVELLA vous franchirez le pont Ladrón et la rivière du même nom (pont et rivière du voleur) : sans doute y avait-il dans ces parages des brigands. Puis vous traverserez CALZADA, puis CALLE et BOAVISTA, avant d’arriver à SALCEDA, pour le pique-nique.
Quelques centaines de mètres après SALCEDA, prenez le temps de lire la plaque scellée au bord droit du Chemin. L’endroit est émouvant, quelquefois les pèlerins laissent un bouquet de fleurs ou leur chapeau pour rendre hommage à Guillermo WATT décédé à une journée de marche de COMPOSTELLE. Dans les quatre derniers km de ce jour vous traverserez également : RAS, BREA (le 3ème en 3 jours) Ce nom vient du latin « vereda » (sentier) et EMPALME. Avant d’arriver à SANTA IRENE, vous franchirez le petit col Alto de SANTA IRENE à 405 m. Dans le hameau de SANTA IRENE de 15 habitants, vous verrez une chapelle dédiée à Santa Irene, bâtisse basse et assez banale, mais à la façade surmontée d’un campanile. Sous son portique, elle abrite une fontaine d’eau qui, dit-on guérit les ampoules ! Suivent quelques maisons formant le hameau où se trouvent 2 refuges. La marche est terminée. Ce n’est pas votre lieu d’hébergement, il est à 20 km ; profitons du déplacement en autocar pour vous rappeler la légende de la coquille :
La coquille Saint-Jacques est un signe de reconnaissance pour les pèlerins qui l’arborent autour du cou ou sur leur sac. Elle est l’emblème du pèlerin, avec la gourde et le bourdon (le bâton). Ce coquillage appelé localement « vieira » est abondant sur la côte galicienne. On pouvait les acquérir sur le parvis de la cathédrale auprès des 99 « concheros » qui avaient le monopole de la vente. Souvenir, signe de reconnaissance, preuve de l’accomplissement du pèlerinage, porte-bonheur. On prêtait même à la coquille des vertus miraculeuses. La légende raconte qu’un chevalier parti à Compostelle en longeant la côte de Galice fût précipité dans la mer par son cheval qui s’était emballé, près de Padron, alors que passait la nacelle transportant le corps de St Jacques. Les eaux se seraient retirées et le chevalier et sa monture seraient réapparus couverts de coquilles qui dès lors deviendront le symbole de l’apôtre. La coquille ne pouvait s’acquérir qu’au terme du pèlerinage. Elle constituait la récompense « visible » du jacquet au terme de sa route éprouvante.
— km 0 : San Marcos, départ de la marche
— km 5,8 : arrivée à Santiago de Compostelle
— après la Messe des Pèlerins en l’église San Francisco (la cathédrale étant fermée pour travaux) départ en car vers Fisterra avec arrêt picnic à Negreira, plaza Coton
— après le coucher de soleil au phare de Fisterra, déplacement en car vers l’hébergement à Sardineiro
Voici donc la dernière étape qui ne se trouve qu’à 5 km environ de SANTIAGO.
SAN MARCOS, au bas de la colline, garde une jolie chapelle sous les chênes. Mais elle n’est pas seule. Un énorme complexe touristique est né d’où polémique pour sa construction. Certes on est très loin de la simplicité habituelle du Chemin. Profitez des abords encore champêtres avant de monter vers la colline qui vous conduit au MONTE DO GOZO, (le mont de la Joie), colline qui permet d’apercevoir pour la première fois les tours de la cathédrale. La coutume voulait autrefois que l’on finisse le Chemin la tête et les pieds nus. Au sommet du Monte do Gozo, 368m, se dresse une statue importante dédiée aux pèlerins. Plus loin un monument commémore la visite du Pape Jean-Paul II pour les JMJ en 1989 avec 500.000 jeunes, ce qui explique l’immense complexe construit sur ces lieux pour accueillir tous les pèlerins. De ce point stratégique beaucoup songeront au chemin parcouru avec la joie de toucher au but, d’autres sentiront leur gorge se nouer à l’approche du dénouement. Ce belvédère est couronné d’une chapelle St Marc et de 3 croix de bois.
Il faut maintenant aborder la descente vers la ville, retrouver l’animation des faubourgs, traverser l’autoroute A9 et la ligne de chemin de fer et alors franchir la PORTA DO CAMINO et pénétrer dans la vieille ville, aller à l’essentiel, se diriger vers la cathédrale. Votre émotion grandit au fil des rues, des places, des monuments rencontrés ; puis un porche, quelques marches à descendre et vous voici place de l’OBRADEIRO (l’œuvre d’or), devant la Cathédrale.
Criez votre joie ! Tombez à genoux pour remercier St Jacques de vous avoir guidés jusqu’au près de lui ! Vous avez vu cette place en photo et vous en avez rêvé. Aujourd’hui vous êtes au cœur de votre rêve. Mais, pour vous en assurer, cherchez au centre de la place, sur le sol, la coquille qui symbolise le "km zéro" du Chemin.
Regardez maintenant la place dont la façade la plus ancienne est celle de l’Hôtellerie des Rois Catholiques du début du XVIe siècle. Et bien sûr vos regards vont détailler toute l’architecture baroque de la Cathédrale et de ses tours imposantes. Vous entrez par le PORTAIL de la GLOIRE, magnifique édifice roman caché par le baroque en admirant toutes ses sculptures. A l’intérieur, l’architecture romane d’origine a été bien conservée. La tradition est de toucher du front la statue de St Jacques placée sur le trumeau.
Au bout de la nef, derrière le maître-autel, se trouve la « Capela Major », la Chapelle Majeure. Cet espace, en plein centre de la cathédrale, est ce qui détonne le plus au milieu de la simplicité romane. Elle marque l’emplacement du tombeau de Saint Jacques, qui se trouve dans la crypte juste en-dessous. La profusion exubérante du baroque cache la structure originellement romane de la Chapelle Majeure. Il faut les voir, tous ces anges qui supportent le baldaquin, tout cet or et cet argent, ponctués par un millier de détails différents, pour se rendre compte de la richesse artistique et des merveilles culturelles accumulées au fil des siècles à Saint-Jacques de Compostelle. La statue principale de St Jacques date du XIIIe siècle et est l’œuvre de Maître Mateo. Le pèlerin peut venir embrasser son manteau, grâce à un escalier construit dans la chapelle. L’endroit est exigu et on doit faire la queue pour y aller. Juste derrière la statue de l’apôtre, il y a un prêtre, qui surveille ce qui se passe et qui donne des bénédictions aux enfants. Les photos sont ici interdites. Sous le maître-autel, dans la crypte, une châsse d’argent contiendrait quelques reliques de l’apôtre et de 2 de ses compagnons.
Vous restez peu de temps à SANTIAGO, il est impossible de détailler dans ce modeste exposé toutes les richesses de cette ville comptant 46 églises, 114 clochers, 288 autels, 36 confréries, des palais, des portes, ses 3 vieilles rues typiques inscrites au Patrimoine Mondial... Il faudra revenir visiter cette ville étonnante, flâner et chanter avec les groupes des « tunas » le soir sur la plaza do Obradoiro et pourquoi pas aller dîner à l’Hôtellerie des Rois Catholiques...
Vers le CAP FINISTERRE à 92 km de Compostelle, au-delà de Santiago et de son sanctuaire, jusqu’au bout de la terre, jusqu’aux rives de l’océan.
— NEGREIRA, grande localité de 2000 habitants, ville d’origine médiévale portée à la littérature par Ernest Hemingway, entre autres, qui fait référence à elle dans le roman « Pour qui sonne le glas ».
— À la sortie de FISTERRA, dans l’église médiévale Santa María das Areas (Ste Marie des Sables), on vénère une statue de saint Jacques, frère jumeau de celui de Burgos et la statue du Santo Cristo (Saint Christ) qui rappellent que cette église était le but du pèlerinage catholique.
— Le CAP FINISTERRE, c’est le point le plus occidental de l’Espagne continentale, mais pas de l’Europe continentale (Cabo da Roca, au Portugal, s’avance plus loin dans la mer). Il s’agit là d’une étape mythique qui, d’après plusieurs légendes, était déjà empruntée par les pèlerins au Moyen-âge. On dit d’ailleurs que c’est depuis FINISTERRE que ces derniers rapportaient les fameuses conchas, vieiras ou coquilles Saint-Jacques. Mais le CAP FINISTERRE c’est aussi le lieu où serait arrivé par la mer le corps de l’apôtre Jacques, avant d’être enterré par quelques fidèles à Compostelle.
De tout temps, les hommes se sont rendus jusqu’à ce promontoire ultime, à 600 mètres au-dessus de la mer. Sur la plage, ou près du phare, le pèlerin brûle ses vêtements usés par sa longue marche : le vieil homme meurt ici, à cet endroit extrême où le soleil se couche pour renaître de l’autre côté de la Terre. C’est en ce lieu également que le pèlerin vient chercher sa coquille, preuve du voyage accompli et symbole de renaissance.
— matinée libre à Sardineiro puis voyage en car, arrivée à Carrion de los Condes vers 18h, installation dans l’auberge des "Soeurs Philipenses"